Y a pas mort d'homme

le 05-07-24 17:27

Y a pas mort d’homme.
Ça, c’est sympathique comme phrase ! Qui ne l’a jamais entendue celle-ci, n’est-ce pas ?

« Oh allez, remets-toi, y a pas mort d’homme »

Ça, à l’échelle de notre éducation, elle est largement au niveau des sévices psychologiques. Vous ne trouvez pas ?
Moi ça me donne juste envie de hurler « mais non pu… vous faites ch… ». Bon OK c’est pas trop poli. Mais ce truc c’est une sanction, c’est d’une injustice.
Tout commence quand on est gamin, qu’on pleure parce qu’on a mal, ou triste, ou en colère, ou tout malheur qui fait la détresse d’un enfant. Et là, un adulte bien lancé du haut de sa splendeur balance la petite phrase… Ça vous l’a déjà fait hein ? Si si, réfléchissez, je suis sûr que vous en avez un souvenir bien caché quelque part.

Et puis ensuite on vieillit un peu, on devient ado et on connait ses premières peines et blessures de tout un tas de choses, plus ou moins graves. Et paf, c’est probablement un de vos potes qui vous la sert sur un plateau la petite phrase. Bon après, c’est un peu moins votre pote.

Quand plus tard on est adulte, on commence à avoir de sérieux problèmes. Si, tout le monde a de sérieux problèmes adultes, ne serait-ce que le fait d’être adulte justement.
Vous êtes dans une mouise noire, il n’y a rien qui va, et là quelqu’un de bien intentionné (du moins il le croit) vous balance un : « C’est dur OK, mais y a pas mort d’homme ».
Et là…
Là…
Il pourrait y avoir mort d’homme si vous ne vous reteniez pas !
Et le plus terrifiant, c’est qu’on l’a tous prononcé un jour aussi. Peut être à soi-même pour s’autoconvaincre de relativiser.
Mais relativiser quoi à la fin ? Je ne suis pas un tueur, ce n’est pas une valeur la mort d’un homme, c’est juste un fait terrible indépendant de ma volonté si ça devait arriver.

Alors à tous ceux qui m’ont balancé cette phrase alors que je pleurais parce que je m’étais écorché le genou en tombant de vélo, qui me l’ont livrée alors que j’étais en plein désespoir de me faire larguer par une petite amie, qui me l’ont assénée alors que je me battais avec des huissiers ou des avocats, tous ceux-là… Vous savez quoi ? Le jour où il vous arrivera de bonnes grosses tuiles qui vous pourriront la vie et que vous n’apercevrez pas le bon côté des choses tellement vous êtes au fond du trou, imaginez-moi en train de vous dire « oh ça va, y a pas mort d’homme non plus ».
Et toc.

image pixabay/Christian Dorn